Ruptures scientifiques et innovation

  • Caractérisation physico-chimique des microhabitats que constituent les sédiments colonisés
  • Description de l’écologie des foraminifères dans ces habitats
  • Connaissance de la dynamique des champs de Haploops et de leur impact sur le recyclage des sels nutritifs
  • Impact des câbles semi-enfouis de la station SEM-REV sur cet écosystème
  • Développement d’indices d’état écologique basés sur ces indicateurs

Impact technique et économique attendu

  • Caractérisation physico-chimique des microhabitats que constituent les sédiments colonisés
  • Description de l’écologie des foraminifères dans ces habitats
  • Connaissance de la dynamique des champs de Haploops et de leur impact sur le recyclage des sels nutritifs
  • Impact des câbles semi-enfouis de la station SEM-REV sur cet écosystème
  • Développement d’indices d’état écologique basés sur ces indicateurs

Dates clés du projet

  • Septembre 2016 - Lancement du projet
  • Janvier 2018 - Cartographie des Haploops en mai 2016 et mai 2017
  • Janvier 2019 - Caractérisation géochimique et écologique
  • Novembre 2020 - Publications scientifiques, élaboration d’indices biotiques, thèse soutenue

Démonstrateur

  • Impact des ouvrages posés ou enfouis de la station SEM-REV sur la répartition géographique des champs de Haploops
  • Comparaison de l’écologie des foraminifères et de la géochimie respectivement dans les sédiments « nus » , ceux colonisés par les Haploops et ceux impactés par les ouvrages.

Résultats

Retrouvez ici quelques grandes conclusions issues de ce projet de recherche

LES HAPLOOPS

Les champs de HAPLOOPS sont un écosystème benthique particulièrement riche, permettant le développement d’une macrofaune benthique et d’une faune pélagique.

 

 

La signature acoustique de la présence des Haploops

Les banquettes à Haploops apparaissent comme des surfaces surélevées, hétérogènes et rugueuses ou l’on peut observer des dépressions subcirculaires sur les cartes bathymétriques (gauche). Sur les imageries de rétrodiffusion acoustique (centre), les banquettes à Haploops apparaissent plus sombres que les environnements sablo-vaseux adjacents. En fonction de leur taille, les pockmarks sont visibles comme des disques blancs (vaseux) ou des points noirs.

Les profils Chirp permettent d’identifier précisément la couverture de tubes de Haploops car le réflecteur acoustique de la surface du sédiment a une forme bien distincte en dent de scie (droite).

 

Cartographie de la banquette à Haploops

Estimation de l’étendue de la zone colonisée par les Haploops au large du Croisic en 2018 (ligne rouge continue et pointillée). Cette surface représente environ 40 km². En pointillé bleu, le tracé du câble d’alimentation du site d’essai SEM-REV à travers la zone d’étude (thèse JB Champilou, 2020). Cette carte a été réalisée à partir de la compilation de données acoustiques réalisées grâce au navire scientifique V/O Haliotis (Genavir – Ifremer) et a nécessité plus de 30 jours d’acquisition.

 

 

Expansion des peuplements à Haploops

La dynamique spatio-temporelle du peuplement à Haploops entre 2017 et 2018 réalisée à partir de la comparaison des cartes bathymétriques semble indiquer une forte propagation de cet habitat vers le sud-ouest (zone en jaune) d’environ 2 km², soit environ 5 % de la surface totale du peuplement.

 

Prérequis de l’implantation des peuplements à Haploops

Les Haploops spp. semblent nécessiter un support stable sur une large étendue pour s’implanter constitué soit de graviers (voir vignette 2017 et courbe de densité de taille de particules noire, flèche noire) soit de tubes des générations de Haploops antérieures. Une fois installés, les amphipodes piègent et accumulent des particules fines augmentant significativement leur proportion relative (courbe de densité de taille de particules rouge et bleu pour 2018 et 2019, flèche rouge).

Un second facteur semble essentiel, l’apparition de pockmarks. La zone ou leur densité augmente le plus entre 2017 et 2018 correspond globalement à la zone d’expansion du peuplement à Haploops spp.


LES FORAMINIFÈRES

Écologie des foraminifères

Les assemblages de foraminifères de la vase à Haploops sont caractérisés par une plus forte biodiversité (H’) et un bon équilibre (J) entre les espèces majeures (une couleur par espèce dans les diagrammes). La densité d’individus est relativement basse comparée à la vase non colonisée. Un assemblage dense et déséquilibré, dominé par une seule espèce est un signe d’un environnement subissant un stress. Dans le cas de la vase non colonisée, ce stress est principalement naturel, lié aux variabilités de débits de la Loire et de la Vilaine et à la dynamique physique de cet environnement littoral (courants, tempêtes, marées, …).

 


LES IMPACTS

Impact de l’installation du câble électrique export de SEMREV sur les fonds marins

L’enfouissement du câble électrique du site d’essais en mer du SEM-REV en 2012 a laissé des marques différentes dans chaque facies sédimentaire traversé qui s’effacent à des rythmes inégaux. Ces marques sont repérables sur les cartes bathymétriques et les imageries sonars.

Dans la vase sableuse fluide présente à l’est du peuplement à Haploops, les images obtenues en 2017 et 2018 ne montrent plus  aucun signe du tracé du câble (carré bleu). Ici l’écosystème a retrouvé son état d’origine en moins de 4 ans.

Dans la banquette à Haploops, un profond sillon irrégulier est clairement visible en 2017 sur la carte bathymétrique (carré orange). Cette tranchée n’apparaît pas sur l’imagerie. En 2018, certaines fractions de cette tranchée semblent avoir été comblées (ovales rouge), indiquant un temps de résilience d’au moins 6 ans.

Dans le sable vaseux avec gravier, le tracé du câble est visible à la fois sur l’imagerie et sur les cartes bathymétriques. Dans ce faciès, la cicatrice est large, rectiligne et relativement peu profonde (carré vert). Les sédiments dans cette tranchée semblent être, depuis la mise ne place du câble (images de 2018), plus fins et/ou plus fluide. Aucune trace de retour à l’état initial n’est détectable après 7 ans.

 

Protocole de diagnostic d’impact : les indices biotiques

Les indices biotiques sont des outils qui synthétisent l’information sur la qualité des écosystèmes de manière simple telle qu’une valeur numérique que l’on peut associer à un état caractéristique de l’environnement. Ces indices se basent sur différents groupes taxonomiques servant de bio-indicateurs. Il existe des indices basés sur la diversité spécifique, et d’autres basés sur des groupe écologiques d’espèces.

Dans ce dernier cas, l’assignation des espèces aux groupes écologiques se base sur l’observation de leurs réactions face à différents stress environnementaux (par exemple un enrichissement en matière organique, voir représentation ci-dessus). Le mode d’assignation des espèces à chaque groupe écologique varie d’un indice à l’autre, ainsi que la manière d’intégrer les groupes écologiques dans le calcul de l’indice.

Impact de l’installation du câble électrique export sur les communautés de foraminifères

Dans le cas d’une zone impactée relativement peu étendue (quelques mètres de large) les foraminifères apparaissent comme un outil d’étude adapté. En effet, un grand nombre d’individus représentant la biodiversité du milieu peut être obtenu en collectant une faible quantité de sédiment. Grâce à cette caractéristique, il est possible d’étudier des écosystèmes de petite taille et de réaliser des répliquas d’échantillons afin de renforcer les analyses statistique postérieures.

Dans le cas de l’étude de la tranchée du câble, un transect a été réalisé depuis le fond de celle-ci (H1), jusqu’au milieu non impacté de la banquette à Haploops spp. (H4), avec un point intermédiaire sur le talus de la tranchée (H2). Trois carottes sédimentaires dédiées à l’analyse des communautés de foraminifères ont été prélevées à l’aide de plongeurs pour chaque station. Le déploiement de carottier embarqués ou de bennes déployés depuis le pont du bateau a une précision de localisation de l’ordre de quelques mètres carrés, , ce qui rend leur utilisation impossible pour une telle approche spatiale.

Cinq ans après l’installation du câble SEM-REV (en 2017), il est observé peu de différences sur les communautés de foraminifères entre la station de référence et les 2 stations impactées. Les différences se concentrent sur la répartition verticale des communautés et reflètent probablement l’absence de la banquette de Haploops dans le sillon du câble (voir les photos de carottes associées).

 

État écologique des différentes stations et limites des indices biotiques

Le test de deux indices biotiques (le Foram-AMBI atlantique et le TSI-Méditerranée) a été réalisé en utilisant les données de faunes de foraminifères le long de deux transects, au sein de la banquette à Haploops et dans la vase-sableuse adjacente.

Même si les deux indices ne positionnent pas les stations dans les mêmes états écologiques (à cause des différences de calcul et des corrections appliquées), les tendances sont identiques :

  • Une grande distinction peut être faite entre les deux sites, la vase sableuse non-colonisée présentant des résultats systématiquement plus mauvais, signe d’un environnement stressé.
  • Un gradient décroissant de l’état écologique est observable entre la banquette à Haploops et le cœur de la tranchée, soulignant que la tranchée reste un milieu impacté, même après 5 ans.

Pour pouvoir appliquer ces indices, il a fallu assigner certaines espèces majeures qui ne l’étaient pas, ou modifier le groupe écologique proposé dans la littérature scientifique en prenant en compte nos observations écologiques port les assemblages locaux.

Les corrections appliquées au TSI-Med ne prennent pas en compte les spécificités trophiques du Golfe de Gascogne ce qui biaise les valeurs absolues des états écologiques calculés. L’écologie de certaines espèces reste à mieux préciser pour que l’assignation à un groupe écologique soit complétement fiable.


GÉOCHIMIE

Géochimie sédimentaire profonde

Les pockmarks indiquent des émissions éruptives de méthane dans les fonds marins. Cependant, le méthane peut aussi remonter depuis son réservoir par des processus plus calmes mais continus à travers les sédiments par diffusion. Des carottes de 5 mètres réalisées dans les deux faciès sédimentaires suivis dans HOOPLA montrent en effet une zone de production de méthane plus proche de la surface dans le faciès à Haploops et pockmarks par rapport au faciès vase nue. Le méthane étant une espèce chimique réduite du carbone, en contact du sulfate de l’eau de mer, il s’oxyde et disparaît assez vite, ce qui l’empêche de diffuser dans l’eau au-dessus du sédiment. On peut noter, près de la surface dans le faciès à Haploops que la distribution verticale du sulfate est perturbée et rendue plus homogène que pour le faciès à vase nue. Cela est dû aux nombreux tubes de Haploops abandonnés qui constituent un enchevêtrement de conduits qui permettent l’eau de mer de circuler effaçant ainsi les gradients chimiques du sédiment.


Géochimie sédimentaire superficielle

Grâce à des techniques innovantes (DET-2D), nous sommes en mesure de cartographier à l’échelle submillimétrique les composés chimiques dissous dans le sédiment. On peut donc étudier en détail l’effet de l’enchevêtrement de tubes de Haploops sur la distribution de nitrate, phosphate et ammonium pour les deux faciès étudiés. On peut observer pour les sédiments à Haploops que phosphate et ammonium ont une organisation verticale qui correspondrait à l’effet de la circulation de l’eau. Cela se traduit pour l’ammonium à des variations de concentration moins marquées. La conséquence de ces circulations est l’oxydation efficace de l’ammonium générant un excès de nitrate dans la colonne d’eau près du fond par rapport au faciès à vase nue. Cela pourrait contribuer à alimenter la production primaire locale qui constituerait une source de nourriture moins ponctuelle que la mise en suspension de matière organique lors des éruptions de méthane.

Publications et communications produites

Thèse
Publications
Communications orales
À destination du grand public
  • La Mer XXL, exposition universelle – Exposition « Les Haploops » – 29 juin/12 juillet 2019 : Espace « Carré des Sciences » avec Centrale Nantes et l’Université de Nantes, ainsi que 2 tables rondes sur l’éolien flottant
  • Exposition « Foraminifères, l’océan à la loupe » au Muséum des Sciences Naturelles d’Angers – Exposition en partenariat avec l’Université d’Angers dans le cadre du projet WEAMEC HOOPLA, du 12 novembre 2020 au 19 septembre 2021.
  • FILM « Haploops & Pockmarksson », réalisé par Quentin LETOUT & Agathe ZAVARO dans le cadre du projet HOOPLA